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Photo du rédacteurSylvie Natpro

La ferme de Neubempt : autonomie et diversification sous le viaduc de Moresnet

Dernière mise à jour : 15 déc. 2020



Historique de la ferme

Remi a repris la ferme de son père en 1985 dans le village de Moresnet (commune de Plombières). Même s’il a grandi à la ferme et a aidé ses parents aux travaux quotidiens, il n’était pas vraiment passionné par le métier ni réellement connaisseur point de vue technique. Peu convaincu par le modèle conventionnel et ses montagnes de beurre et de poudre de lait, il décide de passer en bio en 1998 lorsque c’était financièrement possible. Et ce fut une révélation avec la rencontre de Michel Sencier, agronome français qui conseillait les agrobiologistes à cette époque. Remi a découvert et testé ses techniques qui prônent avant tout l’autonomie de la ferme. Au début des années 2000, sur trente hectares, il est cependant difficile de vivre de l’activité agricole. Faut-il agrandir la ferme ? Vera, qui n’est pas issue du milieu agricole, préfère la diversification. Et c’est à partir de 2008 que se développent le gîte, la transformation du lait à la ferme, les colis de viande , la vente de pommes de terre, de jus de pommes et de sirop de poires. Remi et Vera sont engagés dans le label Nature & Progrès depuis 2011.




Activités de la ferme

La ferme compte aujourd’hui 40 hectares de terre agricole, dont seulement un demi-hectare en propriété, le reste étant loué sous le régime du bail à ferme. La grande majorité des terres est en prairie permanente, dont une partie en pré-verger, et environ 4 hectares sont cultivés en prairies temporaires en rotation avec des pommes de terre (0,5 hectares). L’activité principale est l’élevage de vaches laitières avec transformation lait-viande, mais elle compte aussi la culture de pommes de terre et la valorisation des fruits du verger.



Cultures

Les cultures sont en rotation sur 7 ans. Pour installer les cultures, Remi évite le labour en travaillant avec une fraise et une déchaumeuse. Pour les pommes de terre, il a choisi la variété Nicola, relativement résistante aux maladies, très bonne de goût, multi-usages et de bonne conservation. Les pommes de terre ne reçoivent aucun traitement contre le mildiou, ce qui est rare en agriculture. Il arrive que les feuilles soient touchées par la maladie, mais rarement les tubercules. Les prairies temporaires sont issues d’un semis Sencier n°4, mélanges de graminées et de légumineuses, ces dernières étant sélectionnées pour éviter la météorisation, gonflement du rumen pouvant provoquer la mort du bétail. Jusqu’en 2016, Remi a cultivé deux hectares de céréales fourragères en association avec des légumineuses (triticale-avoine-pois) pour autoproduire le complément de ses vaches laitières. Cependant, devant faire face à d’importants dégâts de sangliers, Remi a abandonné cette culture.


Parcelle de pommes de terre défanée

Prairies et verger

Une partie des prairies permanentes est plantée d’arbres fruitiers, soit au sein même des parcelles, soit en bordure. Les arbres sont de variétés rustiques et locales de pommes et de poires principalement, en demi-tige et en haute-tige. La production fruitière est valorisée en sirop de poires et en jus par la Siroperie artisanale d’Aubel et vendue à la ferme. Si ce n’est pas une activité économique importante de la ferme, la production fruitière participe à sa résilience en diversifiant les sources de revenu.



Elevage

Remi élève une trentaine de vaches laitières, soit une cinquantaine de bêtes. Il a commencé avec de la pie noire Holstein et sélectionne son troupeau pour retrouver les caractères de la « Blanc-Dos », ancienne race du plateau de Herve à tendance mixte. Cela signifie que les bovins produisent du lait tout en valorisant bien la viande. Remi ne pratique plus l’insémination : un taureau s’occupe des saillies, ce qui est plus facile à gérer. Les mâles peuvent cependant devenir agressifs, c’est alors le moment de les valoriser en colis de viande. Chaque année, quelques taurillons sont également engraissés pour être vendus en colis. Nourris sainement, les animaux rencontrent peu de problèmes de santé. Les frais vétérinaires sont quasiment inexistants. Remi utilise des traitements naturels comme une crème pour trayons à base de cire d’abeilles et des remèdes homéopathiques. Pour tarir ses vaches laitières sans antibiotiques, il espace simplement les traites 6-8 semaines avant le nouveau vêlage. En cas de mammite, il applique de l’argile sur le pis, et ce n’est que dans les cas plus graves qu’il apportera un traitement médicamenteux. L’écornage n’est pas pratiqué pour garder l’énergie des vaches (biodynamie). En hiver, les bovins ne sont pas rentrés en étable mais restent élevés au pré tout en profitant de la présence d’un paillot (aire paillée). Le troupeau est nourri avec l’herbe des prairies (pâturage, ensilage, foin). Les vaches laitières reçoivent, en hiver, un petit complément de tourteaux fournis par la SCAR (max 1,5 kg par vache laitière). Bien nourries mais pas « poussées », les vaches produisent en moyenne 4.500 litres à 5.000 litres par lactation. Remi est passé à la monotraite en novembre 2016 pour alléger son temps de travail.



Valorisation du lait

La majorité du lait est reprise par la laiterie coopérative Arla (anciennement Walhorn), tandis qu’environ 5 % va aux veaux et 10 % à la transformation. Chaque semaine, Vera utilise 600 litres de lait pour la confection de yaourts nature ou parfumés, 70 litres de lait pour la maquée nature ou aux herbes, 6 litres pour la réalisation de puddings et elle produit également une vingtaine de fromages frais épicés. La transformation est réalisée dans un conteneur aménagé, installé dans la cour de la ferme. Le contenant et le contenu ont été achetés en occasion ou récupérés, ce qui en fait un investissement relativement léger. La gestion de la température dans le conteneur en hiver ou en été est sans doute le seul grand problème outre l’espace assez restreint mais suffisant pour une transformation à petite échelle. Une personne a été engagée 12 heures par semaine pour aider Vera dans la transformation laitière. Vera a fait des recherches pour trouver un producteur local bio pour les confitures utilisées pour les yaourts, mais n’a pas encore trouvé la perle rare. Les confitures utilisées sont biologiques mais la provenance des fruits est inconnue. Les produits laitiers sont proposés dans des bocaux en verre consignés, ce qui permet de limiter le gaspillage et de réduire les achats de contenants. Cependant, la gestion du nettoyage des bocaux est difficile du point de vue logistique, et une partie de bocaux trop sales sont éliminés.




Valorisation de la viande

Les veaux mâles et les vaches maigres sont vendus au marchand pour être valorisés dans la filière conventionnelle. Pour les bêtes mieux engraissées, Remi parvient parfois à négocier pour les faire passer en bio. Chaque année, 3-4 bêtes sont vendues sous forme de colis de viande. Les animaux sont amenés par le marchand à l’abattoir d’Aubel, puis la carcasse va dans un atelier de découpe local mais malheureusement non certifié bio, ce qui signifie qu’à cette étape, la viande ne peut plus porter le label biologique. La viande conditionnée est ensuite vendue en direct à la ferme.


Commercialisation

La commercialisation est réalisée via différents canaux. Un frigo est accessible en libre-service à la ferme. De jour comme de nuit, les clients peuvent venir chercher leurs produits. Ce système basé sur la confiance permet l’économie d’une permanence à la ferme et fonctionne très bien. La ferme fournit également des groupements d’achats communs, des magasins bio, un Carrefour market franchisé à la Calamine, et un grossiste, Ecodis, qui rend disponibles les produits de la ferme un peu partout en Wallonie. La diversité des acteurs permet une sécurité en cas de perte d’un débouché. La demande est supérieure à l’offre malgré l’augmentation de la transformation ces dernières années.



Conclusion : leurs choix et leurs pratiques inspirantes


La diversification

Remi et Vera sont heureux de leur diversification. Elle leur permet de mieux valoriser leur travail. C’est toujours un plaisir de transformer du lait en bons produits, de rencontrer les consommateurs et leur faire découvrir le fruit du travail dans la ferme. Leurs choix sont basés sur ce qu’ils aiment faire davantage que par un intérêt économique. Et la demande est présente ! Des difficultés ? La transformation et la vente demandent beaucoup de travail, c’est surtout le temps qui manque et non les débouchés. Des projets ? Remi et Vera avancent dans l’autoconstruction écologique d’un local de transformation plus spacieux et d’un magasin à la ferme qui pourrait proposer également d’autres produits locaux.


Retrouver du temps

Le passage à la monotraite permet à Remi de se libérer de l’astreinte du soir, ce qui est un gain important au niveau du confort de vie ! L’engagement de personnel permet aussi à Vera de souffler un peu. La récolte collective des pommes de terre est un moment privilégié de partage qui permet aussi d’économiser le temps nécessaire au ramassage des tubercules.


Le label Nature & Progrès

Remi et Vera ont rejoint le label Nature & Progrès pour deux raisons : augmenter leur clientèle (c’est fait et ils ont d’ailleurs trop de demande !) et soutenir l’association, qui selon eux, est la plus rigoureuse dans la définition du bio, et qui défend ardemment ses valeurs.




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